Quand les taux d’intérêt en ébranlent plusieurs

Publié dans la Canada-Français, édition du 23 mai 2019

Ils sont historiquement bas pourtant la moindre hausse des taux affecte autant les consommateurs que les retraités, qui ont pourtant deux positions contrastantes. D’une part les bas taux d’intérêt permettent aux consommateurs de pouvoir se procurer des biens de consommations, habitations et autres à des taux de financement avantageux. D’autre part les retraités qui cherchent la sécurité s’ennuient des taux d’intérêt élevés et de leurs rendements. Deux positions opposées!

CONSOMMATEURS

Selon les derniers sondages, près de la moitié des consommateurs affirment qu’ils n’en sont qu’à 200$ par mois de ne pas joindre les deux bouts. Entre l’été 2017 et l’automne 2018, la Banque du Canada a fait passer son taux directeur de 0,5% à 1,75%, taux quand même historiquement bas, mais les plus élevés depuis la crise financière de 2008. Pas étonnant que le Gouverneur de la Banque du Canada s’est montré inquiet la semaine dernière. Avec les changements climatiques et ses effets, pas surprenant que les sinistrés soient coincés financièrement et peinent dans ces conditions à respecter les échéances de paiements.

Cette difficulté de rencontrer ses obligations financières par les consommateurs a fait de sorte que les prêts délinquants ont augmenté au dernier trimestre de 2018 et risquent de devenir la norme en 2019. Le taux de faillite a augmenté de 15% dans la deuxième moitié de 2018. Comme on le sait, l’endettement a beaucoup augmenté chez les 65 ans et plus, de sorte que leur taux de délinquance dans cette catégorie a augmenté de 7,2% en 2018.

L’enquête de décembre dernier dévoile également que 31 % des Canadiens sentent qu’ils ne sont pas en mesure d’acquitter leurs factures et le paiement de leurs dettes.

RETRAITÉS

Il n’y a pas que les consommateurs qui sont affectés par les taux d’intérêt. Imaginez la personne retraitée, allergique aux placements risqués, qui tire peu de rendement de son portefeuille alors qu’elle compte sur les taux d’intérêt pour elle aussi joindre les deux bouts. Les Américains ont mené le bal des hausses des taux jusqu’à tout récemment. Dans les faits, aucune grande puissance économique n’a vraiment encore haussé ses taux et plusieurs pays n’osent même pas encore y penser. Dans plusieurs pays, le taux à court terme est encore négatif. Eh oui, vous avez bien lu, négatif! Cela va-t-il changer bientôt? Les économistes de renoms pensent que les taux n’augmenteront pas à court terme. Si votre profil d’investisseur est du type conservateur, le rendement de votre portefeuille vous a sûrement semblé anémique ces dernières années. Normal, alors que les taux d’intérêt montaient, les nouvelles obligations étaient prisées et vos fonds comportant de vieilles obligations émises alors que les taux étaient plus bas devenaient moins intéressantes. La bonne nouvelle c’est que les taux sont appelés à baisser et ainsi l’inverse se produira et vos fonds d’obligations reprendront de la valeur.

INFLATION

Dans les faits, les banques centrales se servent des taux d’intérêt pour contrôler l’inflation. Toutefois il appert que le fameux objectif d’un taux d’inflation à 2% (annualisé et normalisé) n’a pas encore été atteint. Inflation? Non plusieurs pays craignent la déflation, malgré divers facteurs tels que le manque de main-d’œuvre, la hausse des tarifs douaniers, la hausse du pétrole et, etc… Au Canada certains biens ont augmenté plus rapidement que d’autres, l’on n’a qu’à penser à l’immobilier, mais pour le reste il a été de 1,8% au Québec en 2018. Pourtant c’est le plein emploi et on pourrait s’attendre à ce que l’inflation soit plus élevée.

DU POSITIF!

Qu’on le veuille ou non, le crédit c’est l’oxygène du système financier et économique. Selon certains spécialistes il faut s’attendre à ce que le taux à court terme des banques centrales soit à un taux près de zéro% au moins 30% du temps. Pourquoi? Pour maintenir le financement à bas coût et donner accès aux entreprises et consommateurs au crédit. Une baisse de taux qui s’avéreraient bienvenue aux yeux des consommateurs déjà étouffé et bénéfique pour la valeur des titres obligataires en circulations des retraités.

Une bonne nouvelle pour les épargnants est survenue en décembre dernier alors que la réglementation des fonds communs a changé. Depuis de nombreuses années l’on voit les grands investisseurs institutionnels, tel que la Caisse de dépôt et placement du Québec, le Régime de retraite des enseignantes et enseignants de l’Ontario (RREO) obtenir de bons rendements alors que votre portefeuille peine à donner un rendement semblable. La réalité est que votre portefeuille et celui de ces institutions fonctionnait selon des règles différentes. Ces grands fonds institutionnels investissent depuis de nombreuses années dans des placements non traditionnels afin de pallier aux faibles rendements des obligations. Dans ce contexte, le nouveau Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement permet dorénavant aux fonds communs de contenir ces placements de types non traditionnels, ce qui favorisera la diversification et la réduction des risques du portefeuille.

Une chose est certaine, la mondialisation prend de plus en plus de place dans notre quotidien. Vous n’avez qu’à penser au conflit économique Amérique-Chine et de ses impacts. Les choses changent rapidement. Qui eu cru que l’on rebaisserait les taux d’intérêt?

Christian Dufour, auteur/author