Achat d’une maison : les pour et les contre

Chronique financière,
publiée dans
le Canada Francais, le 23 janvier 2013

 

 

La semaine dernière je vous faisais part que le prix des maisons était surévalué, principalement en raison du fait que les salaires ont augmenté moins rapidement que le prix des maisons. Je vous mentionnais également que le marché américain est différent du marché canadien en raison de la déductibilité des intérêts, ce qui a été l’une des composantes de la débâcle du marché immobilier américain. Quand hypothéquer et acheter toujours plus gros devient un avantage fiscal, jusqu’à ce que son revenu soit insuffisant (ex : perte d’emploi) là, la déduction fiscale n’a plus sa place!
Je parlais avec un copain courtier immobilier au langage coloré qui me disait, que le prix des maisons reste stable grâce au ruban collant qu’est le faible taux d’intérêt. Certes c’est un facteur crucial.
Peut-on parler d’investissement lorsque l’on parle d’une maison? Je vous parlais de contreverse, et bien, donnez-vous la peine consulter le Web. Il y a beaucoup de discussions. Pas étonnant que nos voisins américains soient enflammés par le sujet  après avoir vu la valeur de leur maison fondre! Je vous présente les groupes en cause, soit les gens qui croient que leur maison est un investissement (les POUR)  et  ceux qui militent pour le contraire (les CONTRE)!

Les POUR
Les partisans du POUR sont principalement de gens de l’industrie, des courtiers immobiliers, ou, des gens qui ont été échaudés par le marché boursier de 2008-2009. Ces derniers ayant lancé la serviette face à la bourse ne jurent  dorénavant que de par leur maison comme investissement.  Des Canadiens en majorité, leurs parents ont fait de l’argent avec l’immobilier et ils en feront également.  Ils sont des plus optimistes, et comme disent les plus agés, ?ils n’ont jamais perdu d’argent avec la brique et le ciment”.
Ce qui milite en leur faveur c’est l’effet levier du financement hypothécaire. Ceci est particulièrement vrai au Canada où les institutions telles que la SCHL (Société Canadienne d’Hypothèque et de Logement), organisme fédéral, protègent les prêteurs lors de reprises de possession et donne ainsi un accès plus facile aux acheteurs ayant une mise de fonds initiale moindre. Certains de ces militants reconnaissent volontiers qu’il s’agit d’une économie forcée, qu’ils n’auraient pas fait autrement.  Le fait que normalement l’on ne paie pas d’impôt sur le profit de la vente est également un argument en leur faveur.

Les CONTRE
Vous l’aurez deviné, ils proviennent principalement du marché financier, courtiers en valeurs financières, représentant en fonds communs…Pour eux, à long terme, les marchés boursiers ont procuré plus de rendement et la concentration d’actif est synonyme de risque.
Là où ils touchent un point sensible à l’encontre du POUR, c’est en regard du calcul de la rentabilité. En effet, ces militants martèlent que les tenants du POUR ne tiennent pas en compte les frais de départ que sont les frais relatifs au notaire, évaluation, inspection, assurance hypothécaire (plus TVQ à 9%), droits de mutation, plus, les frais annuels de remboursements hypothécaires, taxes, réparations, assurance-habitation et autres, de sorte que le profit est parfois très mince. S’il y a un facteur que les propriétaires oublient de comptabiliser, c’est les frais de réparations. Non, les composantes d’une maison ne sont pas éternelles. Voici quelques exemples de durée de vie : stratifié de comptoir 15 à 20 ans, moquette de plancher  de 8 à 10 ans, robinets de cuisine 15 ans, humidificateur  8 ans,  asphalte d’entrée 7 à 15 ans, gouttières 20 ans… Si l’on comptabilisait à chaque les fois que l’on se rend au centre de rénovations  et quincailleries faire un petit achat, l’on serait surpris par l’addition!

TAUX D’INTÉRÊT
Il faut cesser de croire que la période de bas taux d’intérêt sera infinie. Pour une hypothèque de 200 000$ amortie 25 ans, passer d’un taux de 3,5% à 6,5% en coutera 341,20$ de plus par mois. Actuellement les taux sont excellents, mais si votre revenu n’est pas susceptible de s’améliorer pour faire face à une hausse des versements, questionnez-vous quant à votre avenir de propriétaire. Vu que les gens utilisent l’hypothèque, effet de levier pour acheter une maison, cela signifie que les gains et pertes sont amplifiés. Ainsi les joies de la propriété sont amplifiées dans un marché haussier et douloureuses dans un marché baissier. Gardez-vous une marge de manœuvre.

FISCALITÉ
Un bref mot sur la fiscalité des résidences principales : TOUS les profits sur les biens sont en principe imposables lors d’une revente. La résidence principale souffre d’une exemption si vous la qualifiez de résidence principale pendant toute la période que vous en êtes propriétaire. Le calcul mathématique exact vous accorde même une année de sursis pour laquelle vous pourrez ne pas l’avoir habité.  Une seule et unique résidence peut ainsi être qualifiée par famille.

COMPARABLES?
Pour moi il est difficile de comparer investissement et maison. Oui, elle est un actif, mais un investissement, j’en doute? Pour moi un investissement rapporte un revenu régulier ou/et procure un gain.  La maison ne répond pas à ces critères. Un acheteur doit-il se demander si sa nouvelle maison va lui rapporter 10%? On l’espère tous, mais avant tout, l’on doit avoir un toit, résider quelque part, avoir un endroit pour élever sa famille en toute quiétude. C’est émotif avant tout. De plus si vous vendez à fort prix votre maison, et faute de sortir du marché, ou en acheter une plus petite, vous paierez aussi cher pour la prochaine. De plus, un investissement doit être liquide : il doit pouvoir se vendre rapidement sans y laisser sa chemise!

ET VOUS?
Si vous vous questionnez pour acheter une maison ou louer, consultez le site de l’AMF, une calculette y existe pour comparer un achat et une location. Que vous louez au lieu d’acheter, ou que vous achetiez plus petit, dans l’un au l’autre des cas, pour être une bonne idée financièrement, cela dépendra de ce que vous ferez avec l’argent ainsi épargné. Sera-t-il simplement dépensé ou investi?  Il y a des gens qui se créent des obligations pour limiter leurs dépenses.
Si vous êtes près de la soixantaine, interrogerez-vous quant à l’état des réparations qui seront à effectuer sur votre maison : peut-être sera-t-il temps de vendre? On s’attache à notre maison, mais faut surtout pas qu’elle devienne un boulet. Chose certaine, à titre de planificateur, je considère la maison comme un actif que l’on encaisse à la retraite, tout en y mettant un taux de croissance très, très, conservateur.  Quand vient le temps de passer à un autre type de résidence, l’encaissement du prix de la maison aide à compenser pour un manque d’investissement dans ses placements. Ce n’est pas toujours suffisant car l’on devrait vivre de plus en plus vieux!